[les carnets de route ailleurs là-bas]
éphémérides : lever du soleil 06:11, coucher 20:21, lune gibbeuse croissante /// prévision météo Napa : matin 15°C, après-midi 29 ress. 31, soir 19, nuit 14
TRAJET 31/07 /// Napa-Gualala
On quitte le pire motel du séjour par sa saleté, son eau chaude aléatoire et son odeur permanente de curry imprégnée même dans les murs. Ici, le rapport qualité/prix explose. Le gérant, un indien, est sorry, ne peut rien faire. La fine brume matinale se déchire, le soleil inonde le ciel. Quelques miles parcourus et c’est la fin de la Napa Valley. Encore quelques propriétés viticoles au sud de la Sonoma Valley et on file Ouest vers Pont Reyes.


Quand on arrive aux abords du phare, il est dans la brume, le vent souffle fort. Il faudra descendre 313 marches pour en faire le tour et 313 pour remonter au parking, logique. Puis il y a cette femme qui en me croisant prend le temps de faire une halte et de m’expliquer comment aborder les marches pour faire travailler un maximum de muscles. Étonnant ! On reprend la route dans l’autre sens pour récupérer la route 1, l’esprit essoré par les rafales de vent. Plusieurs corps de ferme bordent la route. Parfois, la nouvelle habitation côtoie l’ancienne, encore debout malgré l’état de délabrement avancé. Dans un coin derrière une grange, un vieux break Ford rouillé, des tracteurs hors d’usage. Le temps de faire un stop à Pont Reyes, je rentre dans une librairie. Des œuvres d’Annie Ernaux sont mises en avant à côté des deux prix Pulitzer de fiction de cette année. Dehors, un homme cheveux longs peu entretenus, barbe hirsute et pieds nus, chante, danse en remontant la rue principale croisant le regard désemparé des promeneurs.

Bodega pas loin, on a fait un crochet pour revoir un des lieux de tournage des Oiseaux d’Hitchcock, l’école, l’église.


Faire la route, c’est aussi s’accorder un temps à part ouvert au silence, à la réflexion, à l’évasion vers un autre ailleurs. C’est un temps hors du temps. On roule du matin jusqu’au soir sans connaître la destination du lendemain. L’esprit reste ouvert, attentionné, à l’écoute. Le paysage défile, on s’arrête parfois, on profite de ce que la nature nous offre, des villes qu’on traverse.



Il m’est nécessaire, voire vital de garder trace de ces moments uniques. Écrire, prendre des photos, remplir un carnet de notes est fastidieux quand on est dans le rythme du voyage, mais ça en vaut la peine, car le voyage se construit aussi avec ces petits détails notés rapidement sur un bout de papier, ou figé dans le cadre d’un viseur d’appareil photo. Si on ne prend pas le temps de les capter, la saveur du voyage en est dépourvue et seul le banal reste, ce qui peut être vu, lu partout sur les réseaux, les films publicitaires. Revenir chez soi avec dans sa mémoire la trace des moments uniques qui ont fabriqué le voyage est précieux. Les retrouver et les compléter par l’écriture permet de poursuivre ce temps si apprécié, si essentiel.

Route : Napa – Petaluna – Pont Reyes – Bodega Bay – Jenner – Gualala